L'utilité d'une personne se remarque-t-elle à sa capacité à se différencier des autres ? Se compte-elle aux nombres d'amis que l'on a ou à la popularité que l'on est capable d'assimiler en une année ? Parfois, je me dis que oui. Parce que ceux dont la réputation n'est plus à faire et à la renommée importante sont également ceux dont on vante le plus d'exploits, le plus talents. Le genre de personne que vous aimeriez avoir prêt de vous à n'importe quel combat, une de ces personnes dont l'on ne peut se passer. Ces noms qui vous effleurent n'importe où de la part de n'importe qui. Tout simplement quelqu'un dont on a besoin. Ce sont des sujets de discussions divertissants, sérieux, époustouflants ou même d'une rare stupidité. Voilà ce que sont les gens célèbres et populaires pour le moins que rien que je dois représenter à leurs yeux : rien de plus qu'un nom dans une discussion destinée à apporter le scoop de l'année. Moi, je préfère que l'on ignore mon nom plutôt que l'on me juge dessus sans savoir qui je suis. De toute façon, je trouve les gens communs plus intéressants, autant par leurs dires et par leur gestes. Et puis, il y a cette barrière invisible entre la notoriété et moi. Parfois, leur monde m'attire mais un geste me fait prendre conscience que je ne suis pas comme eux. Je le sais bien moi que je ne suis pas différent, je ne veux pas l'être. Je reconnais aussi que mes amis se comptent sur les doigts d'une seule main, mais ils me suffisent à me faire respirer de bonheur et je sais surtout que mon cœur ne serait jamais assez grand pour supporter la célébrité. Cela fait-il de moi une personne inutile ? Quand on sait ce qu’on sait, quand on voit ce qu’on voit, on a raison de penser ce qu’on pense.

Birdly se posant sur mon épaule, je comprends vite qu'il apprécie le paysage nocturne tout autant que son maître. Et oui, qui aurait cru que ce hibou aux pelages majestueux et aux yeux d'un rouge flamboyant puisse appartenir à l'élève discret et effacé que je suis ? Assis sur le rebord de la fenêtre à réfléchir sur la raison de mon existence, je me demande qui prendrait soin de ma mère, de ma sœur ou même de Birdly si je venais à disparaitre. Alors je prends conscience que ma mission n'est peut-être pas de sauver le monde mais de sauver des personnes qui ne sont rien d'autre que mon propre monde à moi. Je réfléchis ensuite à la pensée que je ne fasse pas parti des gens reconnus de l'école et puis je me souviens des paroles de ma mère : La célébrité, ce n'est qu'un nom imprimé cent fois. Et c'est alors souriant que je pose les yeux sur l'un des plus beaux paysages qu'il ne m'est jamais été donné de connaître avant et que je peux apprécier dans toute sa splendeur malgré l'obscurité dominante parce qu'aussi sombre que les ailes d'une nuit sans lune, les étoiles se dressent dans le ciel et rien n'est plus beau. Sauf peut-être leur reflet dans les yeux d'un hibou aux pelages noir et blancs tel que Birdly. On pourrait croire que je m'apprête à sauter comme tout bon suicidaire mais je me sens plus heureux que jamais parce qu'au fond je suis bien content de vivre. Bien qu'une vie qui cherche la sienne n'en est peut-être pas une ?

Le moment parfait, une seule chose me manque. Non pas le bruit, j'apprécie mieux le silence après une journée dans les couloirs de Poudlard, mais la musique. Fort dommage que les petits appareils moldus parfois bien utiles dans la vie ne puissent être d'aucune utilité. Un bon vieux rock et je pourrais peut-être verser une larme. En faite non, il faudrait aussi que je vole sur mon balai, Birdly à côté et ma baguette à la main comme le ferrais un héros et alors là oui, peut-être démontrerais-je un peu de la sensibilité que je n'ai pas. Et là je me rends compte que les choses auxquelles je tiens le plus sont en fait les trois seuls cadeaux que mon père ne m'aient jamais fait. Un peu honteux à la pensée de toutes les surprises de ma mère, je suis surpris de me rendre compte que les choses les plus simples de la vie sont parfois les plus belles. Et puis je me souviens des circonstances dans lesquels j'avais reçu ces cadeaux et rectifie ma pensée : entre le grognement de dégoût de mon père m'offrant ces trois précieux cadeaux avec réticences et le sourire flamboyant de ma mère lorsqu'elle m'offrait elle-même de petits présents, c'est son sourire à elle le plus important. Et je me remets à regretter ce que je suis parce que je me dis que moi mon sourire n'est précieux pour personne puisque jamais présent. Et je me jure de changer, de montrer que je ne suis pas qu'un pauvre gars qui ne sait pas s'amuser et rigoler et qu'il suffit d'être mon ami pour voir combien je peux être débile et déjanté. Mais quelqu'un n'arrivera-t-il jamais à passer outre le fait que lorsque je parle, oui on pourrait croire que je m'excuse d'être en vie ? On a beau connaître de belles phrases, qui en fait vraiment attention : les apparences sont trompeuses.

Et d'un coup, j'en ai marre. Était-il donc impossible de cesser de penser ? Nuit et jour mon cerveau est en ébullition et il m'est bien difficile d'apprécier le vent qui effleure mon visage avec ce cafard dans mon cœur. Bah oui, je déprime. C'est ça non, quand on n'arrive pas à trouver de pensées joyeuses ? Depuis combien de jours n'ai-je parlé à personne ? Personne ne viens vers moi et mon caractère ne me fais jamais allé vers qui que ce soit. Il y a bien eu cette fille que je ne connais pas, mais elle n'a fait rien d'autre que de me rappeler mon regard dénué d'expression digne d'un dépressif. Je me suis bien gardé de lui répondre, elle pense ce qu'elle veux après tout mais elle n'a pas non plus cherché plus loin que ce qu'elle peut voir de moi. Dans un excès de brusquerie, je donne un coup de pied dans ce qui semble être un squelette de rat ce qui a pour effet de briser le calme et de faire élever les hululements de plusieurs hiboux encore légèrement endormis. Comme je me le dis rarement, une visite serait la bienvenue car la solitude c'est bien, quand on a quelqu'un a qui le dire. Mais en pleine nuit, qui aurait le courage de grimper les escaliers si ce n'est moi ? En fait, je suis assez taré, il faut l'avouer... J'ai soudainement une folle envie de m'amuser, de virer ce cafard, de montrer et peut-être aussi me prouver à moi-même que je sais m'éclater et je veux tenir ma promesse : me faire plus sociable. En attendant je n'en reste pas moins à contempler les étoiles sur le rebord d'une fenêtre avec pour seule compagnie des hiboux énervés. J'aurais au moins appris une chose cette nuit : les hiboux n'aiment pas être dérangé la nuit. Ce qui est très idiot du fait que ce sont des oiseaux nocturnes, mais niveau étrangeté je crois que je suis mal placé pour même penser à une quelconque remarque, moi dans une volière à une heure si tardive n'ayant pourtant aucunement envie d'envoyer une lettre mais bel et bien de "vivre". Finalement, c'est peut-être moi l'animal le plus nocturne dans cette volière ? Que quelqu'un me montre le bonheur, je l'exige.